RENAISSANCE DU CONGO (12.D.G.P.D)

RENAISSANCE DU CONGO  (12.D.G.P.D)

50 ans d'indépendance pour quelles retombées

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Déclaration de l'ARD à la veille du cinquantenaire de l'indépendance du Congo

La Coordination Nationale de l'ARD se tient à un moment où les pays de l'Afrique francophone ont décidé de célébrer avec faste, le cinquantenaire des indépendances octroyées par l'ancienne puissance coloniale en 1960. Le Sénégal vient d'imprimer le rythme de la danse, le 04 avril 2010. Le coût exorbitant (13 milliards de FCFA) de la gigantesque statue symbolisant la « Renaissance africaine » a soulevé l'indignation de l'opposition sénégalaise qui estime que cette somme faramineuse aurait pu être judicieusement utilisée dans un projet social destiné à soulager les souffrances des populations.

En ce qui concerne le Congo Brazzaville, l'anniversaire du cinquantenaire coïncide avec la municipalisation accélérée de la ville de Brazzaville. Celle-ci avait fait l'objet de 170 projets identifiés depuis 2007, pour un coût global de 168 milliards de FCFA. Aujourd'hui, sur les 170 projets, seule une trentaine a connu un début d'exécution. La population se demande si d'ici au 15 août 2010, les 170 projets seront réalisés. Devant cet échec, le pouvoir vient d'affecter, pour le toilettage de la ville, 13 milliards de FCFA sur les 17 milliards de FCFA, prévus pour les commémorations du cinquantenaire. Rappelons que pour les grands travaux de Brazzaville intégrant l'aéroport de Maya-Maya, le pouvoir avait déjà programmé depuis 2 ans, parallèlement à la municipalisation accélérée 180 milliards de FCFA. A ce rythme, cette municipalisation accélérée de Brazzaville deviendra un gouffre à milliards pour le budget de l'Etat.

La célébration du cinquantenaire des indépendances africaines, pose la question centrale du bilan des 50 ans d'indépendance. A notre modeste avis, au niveau de l'ensemble des pays concernés, seuls semblent émerger du lot sur le plan économique et social, les pays francophones du Maghreb : Maroc, Tunisie, Algérie. Dans les autres pays africains francophones au sud du Sahara, la flamme allumée par des patriotes sincères, tels que KWAME NKRUMA, Patrice Emery LUMUMBA, UM-NYOBE, Ernest OUANDIE, MODIBO KEITA, etc, n'a connu que le temps d'une saison. L'espoir que ces figures emblématiques du mouvement de libération nationale de l'Afrique avaient suscité dans les populations africaines, a été trahi par les nouveaux pouvoirs issus des indépendances de 1960.

La création de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) en 1963, et sa mutation, 41 ans après en Union africaine (UA) en 2004, n'ont pas répondu aux attentes des peuples africains, en quête de démocratie, de liberté, de paix et de mieux-être politique, économique, social et culturel.

Au Congo-Brazzaville, les 50 ans d'indépendance sont marqués du sceau de l'échec. D'une part, ils sont maculés de sang, car, de 1959 à nos jours, le Congo a connu des guerres civiles récurrentes, ayant eu pour causes immédiates les élections. D'autre part, au cours de ces 50 années, les pouvoirs successifs n'ont pas pu et n'ont pas su apporter des réponses appropriées aux besoins fondamentaux des populations qui attendaient de l'indépendance, un changement profond dans leurs conditions de vie. Le bilan des 50ans d'indépendance est très largement négatif. Cet échec tient à plusieurs causes dont il convient d'énumérer ici, les six principales, à savoir :

  1. L'absence tout au long des 50 ans d'indépendance, d'un projet politique national cohérent et d'une volonté clairement affirmée de promouvoir un développement global et harmonieux du Congo et une répartition rationnelle et équitable de la richesse nationale ;

  2. L'absence sous les pouvoirs successifs, d'une véritable politique économique, créatrice de richesses et d'emplois, prenant pour priorités, l'agriculture, l'industrie et la diversification des secteurs, pour permettre au pays de produire lui-même, l'essentiel de ce qu'il consomme ;

  3. Le niveau de formation et le niveau politique relativement bas des équipes dirigeantes et la cooptation complaisante des éléments médiocres aux postes de responsabilités politique, administrative et technique. On le sait, le capital humain est de loin, la ressource fondamentale de toute Nation. Le développement d'un pays est tributaire de la qualité des hommes, de leur savoir et de leur savoir-faire. Une production de qualité passe nécessairement par la promotion de l'excellence ;

  4. La démission des intellectuels.

    De nos jours, le savoir intellectuel est devenu un capital aussi important, sinon plus important que le capital financier. La matière grise est aujourd'hui la ressource principale du développement d'une économie fondée sur le savoir. Dans ce contexte, les intellectuels occupent une place de choix, car, ils produisent des connaissances et inventent de nouvelles technologies. Ils ont en outre pour rôle, d'éclairer par leurs analyses pointues sur les grands problèmes humains du monde contemporain, les décisions des décideurs, c'est-à-dire de montrer la voie. Malheureusement, au Congo, les clercs ont trahi. Ils ne jouent pas leur rôle, soit par carriérisme, soit par peur, soit par opportunisme. Certains sont même devenus des griots, alors que l'intellectuel est par nature iconoclaste, c'est-à-dire, rebelle à toute emprise ;

  5. La conception néo-patrimoniale du pouvoir et le goût immodéré de l'argent.

    Au Congo, à de très rares exceptions près, on entre en politique non pas par conviction, mais par souci alimentaire pour faire carrière et s'enrichir à des fins personnelles. Dans leur immense majorité, les équipes dirigeantes au cours des 50 ans d'indépendance ont manqué trop souvent de civisme et ont été peu enclines au dévouement à l'intérêt général. Elles étaient et sont hantées par le goût du pouvoir. Elles ne pensaient et ne pensent qu'à une chose : le pouvoir, les avantages et les privilèges du pouvoir. Soucieuses avant tout d'acquérir un confort matériel, elles concevaient et conçoivent le pouvoir comme un patrimoine privé et une source d'enrichissement personnel. Elles pensent d'abord et avant tout, à elles-mêmes, à leurs familles, aux gens de leurs villages, districts, régions et ethnies.

  6. Le déficit démocratique et le développement des pratiques dictatoriales dans la gestion du pouvoir

Depuis1960 et plus particulièrement à partir de 1963, la gestion des affaires publiques au Congo a été le fait de partis uniques : le Mouvement national de la révolution (MNR), le Conseil national de la révolution (CNR), le Parti congolais du travail (PCT), avec tous les maux qui ont pour noms : la concentration des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire entre les mêmes mains, l'Etat-parti, la police politique, l'embrigadement des êtres et des esprits, la pensée unique, l'intolérance politique, le bâillonnement des libertés fondamentales, les arrestations et emprisonnements arbitraires, les procès fabriqués, les assassinats politiques (deux Chefs d'Etats  : Marien Ngouabi et Alphonse Massamba-Débat ; un cardinal : Emile Biayenda ; trois (03) hauts fonctionnaires : Lazare Matsocota, procureur général de la République, Joseph Pouabou, président de la Cour Suprême et Anselme Massouémé, directeur général de l'Agence congolaise d'information), sans compter de nombreuses suppressions de vie et disparitions d'innocents. Les recommandations de la Conférence Nationale Souveraine qui avaient soulevé un grand espoir, ont été purement et simplement reléguées au fond des tiroirs.

La conjonction des six facteurs susmentionnés explique dans une large mesure, l'échec des 50 ans d'indépendance du Congo-Brazzaville.

La situation que notre pays connait aujourd'hui, mérite qu'on s'y attarde un instant. Rappelons qu'actuellement, l'économie congolaise est essentiellement une économie pétrolière. Les autres secteurs sont, soit purement et simplement abandonnés, soit exploités de façon marginale. Le secteur pétrolier est celui qui permet à l'Etat de tirer l'essentiel de ses revenus (80%). En effet, à l'examen des chiffres extraits des budgets successifs de 2000 à 2010, la production pétrolière a atteint 1025 millions de barils pour un chiffre d'affaire de près de 152 mille milliards de FCFA. La part de revenu tirée par l'Etat avoisine les 13 mille milliards de FCFA.

Parallèlement, les revenus cumulés, versés à l'Etat par les sociétés pétrolières au titre de la provision pour investissements diversifiés, pour la même période sont estimés à 152 milliards de FCFA. Quant aux secteurs réels, c'est-à-dire les secteurs non pétroliers, le chiffre d'affaire fiscale est estimé à près de 2 mille 700 milliards de FCFA. Dans le domaine maritime par exemple, la Société congolaise des transports maritimes (Socotram) a accumulé indûment (l'Etat seul est habilité à lever l'impôt), en dix (10) ans, près de 55 milliards de FCFA de taxes maritimes, et curieusement, cette société ne s'est dotée d'aucun bateau, alors qu'elle a fait transporter près de 1025 millions de barils de pétrole de 2000 à 2010 et a gagné énormément d'argent sur ces transactions. Elle perçoit en effet, 16, 4 cents par baril levé. C'est véritablement une extorsion inexpliquée des fonds du Trésor public par une société privée.

On le voit, l'Etat congolais a bénéficié de sommes colossales qui auraient pu lui permettre de doter le pays d'un soubassement économique viable et susceptible de lui permettre d'apporter des réponses appropriées aux immenses attentes sociales des populations. Malheureusement, le constat à la veille du cinquantenaire de l'indépendance est accablant : 70% de Congolais continuent de vivre en dessous du seuil de pauvreté ; le chômage est massif, particulièrement au niveau des jeunes (19,40% de moyenne, 32,6%à Brazzaville et 31,5% à Pointe-Noire). Le Congo manque cruellement de services sociaux performants (eau, électricité, formations sanitaires et scolaires, logements sociaux) et d'infrastructures de base viables (réseaux routier, ferroviaire, fluviaux, aériens, réseaux d'information et de communication modernes, etc). Le pouvoir d'achat des populations, en érosion continue, reste extrêmement bas au regard du coût très élevé de la vie. Les retraités vivent un véritable enfer. Les travailleurs sont à la peine.

Aujourd'hui, alors que le budget de l'Etat le permet très largement (2831 milliards de FCFA), le pouvoir s'entête à refuser d'appliquer l'accord qu'il a lui-même signé avec les syndicats, en septembre 2008, en vue de lever dès le 1er janvier 2010, la mesure de blocage des effets financiers des avancements des agents de l'Etat et de promouvoir la revalorisation de la grille salariale de la Fonction publique. Pour justifier ce refus de tenir sa promesse, le pouvoir invoque les négociations avec les institutions de Breton Woods, alors que ces dernières lui demandent avec insistance de mettre en œuvre un véritable programme de lutte contre la pauvreté.

Comme pour se dédommager, le pouvoir brandit à grand renfort de propagande, les quelques infrastructures lourdes, réalisées dans le cadre des opérations de la « municipalisation accélérée », à Pointe-Noire, à Impfondo, à Dolisie et à Owando, d'un coût global évalué par lui-même, à la somme de 400 milliards de FCFA. Mais que représentent 400 milliards de FCFA par rapport aux 13 mille milliards de FCFA qu'il a engrangés au titre des budgets de l'Etat et des excédents budgétaires depuis 2003 ? Une goutte d'eau dans la mer. D'ailleurs, les réalisations sur le terrain ne représentent même pas la moitié de cette somme. Il faut souligner par ailleurs que les quelques infrastructures construites à Pointe-Noire, Impfondo, Dolisie, Owando, n'ont produit aucun effet sur l'emploi, la santé, l'éducation, le niveau de vie des populations dans ces localités. Du reste, plusieurs chantiers commencés, n'ont pu être achevés à ce jour.

Pendant qu'ils affament le peuple, les dirigeants du pouvoir, leurs épouses, frères, beaux-frères, enfants, neveux, maîtresses, se construisent des fortunes colossales et se livrent à des gaspillages scandaleux de l'argent public. Sur le plan social, la société congolaise est coupée en deux : d'un côté, les dignitaires du pouvoir qui s'ébrouent dans l'opulence et la jouissance, de l'autre, le peuple qui broie du noir. « La Nouvelle Espérance » (le programme électoral du président Sassou en 2002) et « Le Chemin d'Avenir » (le programme électoral du président Sassou en 2009) sont dans les faits, des chemins de croix pour le peuple Congolais.

En définitive, les 50 ans d'indépendance du Congo sont des décennies perdues pour le développement. Au cours de ces 50 années, le pays ne s'est pas doté d'infrastructures viables. Il n'est donc pas nécessaire d'engloutir des sommes astronomiques pour financer les festivités relatives à cet échec lourd de conséquences sociales pour le peuple Congolais. Le 15 août prochain devra plutôt être une journée de recueillement et de la réflexion sur l'avenir du Congo. Il est plus que jamais impérieux et urgent de tirer toutes les leçons de cet échec, changer radicalement de cap et adopter une nouvelle conception de la politique, de nouvelles mentalités et de nouvelles pratiques politiques et sociales, articulées autour des standards internationaux de la gouvernance démocratique, rationnelle, transparente et participative.

 

                      Fait à Brazzaville, le 10 avril 2010

                         La Coordination Nationale



13/04/2010
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